LA POESIA DI PATRICIA GUÉNOT – IX/2007

Éloge de la beauté - Virées nocturnes - Pays de lumière - Lune tendre - Mac à dames - Concerto du bonheur - Silencieux grenier - Chat mort - Érable musical - Mac à dames - Flânerie urbaine

Éloge de la beauté

À l'orée du grand bois, les bouleaux et les chênes

Étirent leur feuillage en soyeux étendard

Ondulant dans le vent pour charmer le regard

De la fée des forêts, Diane, qui se promène.

Pour louer sa beauté, les gais pinsons égrènent

Un concerto troublant de trilles babillards

Pendant que le soleil éloigne le brouillard

Afin de caresser sa peau de porcelaine.

Fascinée par l'éclat de son rire charmant,

La rivière s'épanche en vagues de diamants

Qui déversent leurs feux dans les yeux de la belle.

Le muguet, le jasmin, exaltant leurs couleurs,

Composent un tableau pour que la demoiselle,

Émue par leur splendeur, succombe à leurs senteurs.

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Virées nocturnes

Pour égayer ma nuit, souvent, je saigne un mec

Que le hasard vicieux me colle dans les pattes,

Avant de balancer mon poignard écarlate

Près du quidam guignard dont j’ai cloué le bec.

Mon forfait accompli, je m’arrache aussi sec

Avant qu’un poulaga en mission ne m’abatte,

Tandis que le troupeau des bourgeois en cravate

Geint de me voir tenir la flicaille en échec.

Au lieu de regagner mes maussades pénates,

J’asticote crûment les poupées qui me matent,

Si bien qu’elles m’envoient racoler chez les Grecs.

Au matin, épuisée de jouer les pirates,

Je file me pieuter, sourde aux salamalecs

De travelos camés, exhibant leur bifteck.

Pays de lumière

Je viens du pays délicieux

Où les vieilles maisons de pierre

Invitent l’eau de la rivière

À chanter son hymne radieux.

Je conserve au fond de mes yeux

Les jonchées de fleurs printanières

Offrant leurs couleurs incendiaires

Aux rais d’un soleil malicieux.

J’entends siffler la cafetière

Dans la maison hospitalière

De mes grands-parents silencieux.

Je garde en mon cœur la lumière

De l’aube, qui blanchit les cieux

Pour guérir les esprits pluvieux.

Lune tendre

Accrochée dans un ciel étouffant de tristesse,

La lune silencieuse étend d'aigres lueurs

Sur la Terre souillée par les tirs fossoyeurs

Des humains insoucieux des champêtres richesses.

Lassée d'illuminer les soldats qui ne cessent

De changer l'univers en écheveau d'horreurs,

L'astre de nuit déploie ses rayons enchanteurs

Sur le corps endormi d'une exquise princesse.

Tandis que les guerriers déplorent la noirceur

De la voûte où grandit le spectre de la peur,

La belle se réjouit des lunaires caresses.

Le soleil matinal, insensible au bonheur

De la fée solitaire, odieusement s'empresse

D'incendier le berceau des nocturnes tendresses.

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Mac à dames

Savamment attifé d'un air patibulaire,

Un maquereau brutal en costard à carreaux

Balance une mandale au répugnant poivrot

Dont le clébard claudique en clamant sa colère.

Sous les pâles lueurs d'hirsutes réverbères,

Des bourgeois, épuisés en sortant du bureau,

Déversent leur ennui dans de poisseux bistrots

Avant de se payer une femme légère.

Les putains du quartier comptent leurs abattis

Quand un bruyant essaim de camés travestis

Met brusquement le cap sur leur coin de bitume.

Les julots des morues lâchent des malabars

Qui forment les intrus au respect des coutumes

Grâce aux explications de leur hargneux pétard.

Savamment attifé d'un air patibulaire,

Un maquereau brutal en costard à carreaux

Balance une mandale au répugnant poivrot

Dont le clébard claudique en clamant sa colère.

Sous les pâles lueurs d'hirsutes réverbères,

Des bourgeois, épuisés en sortant du bureau,

Déversent leur ennui dans de poisseux bistrots

Avant de se payer une femme légère.

Les putains du quartier comptent leurs abattis

Quand un bruyant essaim de camés travestis

Met brusquement le cap sur leur coin de bitume.

Les julots des morues lâchent des malabars

Qui forment les intrus au respect des coutumes

Grâce aux explications de leur hargneux pétard.

Concerto du bonheur

Je mélangerai ta noirceur

À ma sombre désespérance,

Pour que l’union de nos souffrances

S’épanche en gerbe de douceur.

Je viendrai semer dans ton cœur

Les souvenirs de mon enfance,

Afin que notre amour s’élance

Loin de tes obscures douleurs.

J’immergerai tes défaillances

Dans un puits de tendresse immense

Gorgé de rires enchanteurs.

J’orchestrerai nos différences

En concerto dont la splendeur

Augurera notre bonheur.

Silencieux grenier

Discrètement perché en haut de l’escalier

Aux marches rabotées par les années qui filent

Vers une mort bardée de fantômes hostiles,

Sombre dans l’abandon le silencieux grenier.

Au milieu d’un fouillis de cahiers d’écolier

Constellés de récits aux dessins malhabiles,

S’étalent des photos, souvenirs d’une idylle,

Aux sourires gommés par l’ennui familier.

D’une armoire bourrée d’étranges ustensiles,

S’évapore un parfum dont les notes subtiles

Ravivent les échos d’un bonheur printanier.

Contre le mur lardé de fissures, s’empilent

Des mocassins usés où les chats du quartier

Exercent le tranchant de leurs griffes d’acier.

Chat mort

Dans mon esprit erre un chat mort

Dont les miaulements oblitèrent

La paix de mes nuits solitaires

Afin que je perde le nord.

Au fond de ses yeux perlés d’or

Luisent d’insondables mystères

Que ce félin au pas lunaire

Fabrique pendant que je dors.

D’une griffe avide, il lacère

Mes rêveries pour satisfaire

Sa fureur d’animal retors.

Aussitôt que ma main légère

Se risque à caresser son corps,

Ce monstre capricieux me mord.

Érable musical

Érable dressé vers le ciel,

J'écoute la brise solaire

Chanter sa mélodie légère,

Perçant le silence de miel.

Bercé par les accords sériels

Que jouent les feuilles de mes frères,

J'oublie le dénouement sévère

De notre unisson démentiel.

Dans la froideur crépusculaire,

J'échappe aux instruments vulgaires

Des bûcherons pestilentiels.

Quand pointe un jour radieux, j'espère

Qu'un musicien providentiel

Goûtera mes sons essentiels.

Mac à dames

Savamment attifé d'un air patibulaire,

Un maquereau brutal en costard à carreaux

Balance une mandale au répugnant poivrot

Dont le clébard claudique en clamant sa colère.

Sous les pâles lueurs d'hirsutes réverbères,

Des bourgeois, épuisés en sortant du bureau,

Déversent leur ennui dans de poisseux bistrots

Avant de se payer une femme légère.

Les putains du quartier comptent leurs abattis

Quand un bruyant essaim de camés travestis

Met brusquement le cap sur leur coin de bitume.

Les julots des morues lâchent des malabars

Qui forment les intrus au respect des coutumes

Grâce aux explications de leur hargneux pétard.

Flânerie urbaine

D'esplanade animée en boulevard tranquille,

Le marcheur solitaire explore la cité

Où le soleil couchant insuffle sa gaieté

Au ballet incessant des donzelles graciles.

Voyageur sans bagage, il visite la ville

Au hasard des quartiers dont les murs graffités

De slogans en l'honneur d'une âpre liberté

Ravivent en son cœur une émotion fébrile.

Cependant que la nuit s'empresse d'emporter

Les hommes vers leur nid de tendres voluptés,

Il arpente les rues sous la lune immobile.

Dans le jardin fleuri d'un tandem de vigiles,

Il poursuit son errance, avant de s'arrêter

Sur un banc où l'accueille un clochard édenté.

Patricia Guénot
Società